Cette déclaration est une incompréhension de ce qui se passe réellement. Ma mère a mis fin à sa vie en 2015 par suicide assisté en Suisse et ses trois fils étaient présents. Le processus a comporté 2 entretiens approfondis par un médecin suisse local, qui a clairement confronté notre mère avec de nombreuses questions pour évaluer si elle était saine d’esprit et pourquoi elle voudrait se suicider. Il n’a jamais été question de savoir si elle voulait être tuée par le docteur. En fait, il était très clair tout au long du processus qu’elle serait celle qui dirigerait chaque étape jusqu’à ce qu’au dernier moment en ingérant le pentobarbital.
De même, le jour de son décès, les deux bénévoles qui ont supervisé le processus ont demandé à maintes reprises à notre mère si elle voulait mettre fin à ses jours. Elle a eu de nombreuses occasions de changer d’avis, soit pour retarder ou abandonner son souhait. Et ce processus au cours des dernières heures ne rend pas justice à ses mois de préparatifs.
Notre rôle en tant que médecins est d’être compatissants, et en particulier pour les psychiatres, il est presque impossible de pratiquer nos rôles sans avoir de l’empathie. J’ai ressenti à maintes reprises dans ma vie la souffrance et les difficultés de mes patients et je pouvais facilement comprendre pourquoi certains d’entre eux envisageaient sérieusement de se suicider. J’ai toujours passé du temps à mieux comprendre les sentiments et les pensées d’u(e) patient(e), jusqu’à ce que je puisse faire preuve d’une empathie plausible avec son point de vue et ses sentiments. Cette tâche exige une volonté d’aller au-delà de ses propres limites afin de sentir et de mieux percevoir. C’est à ces moments de profonde connexion que des occasions se présentent d’examiner des solutions de rechange. J’ai eu la chance de ne pas perdre un patient à cause du suicide.
La façon dont le médecin va aborder la question exige que le patient commande en tout temps. Il n’est pas facile de se tuer quand vous devez passer par un processus d’examen, au cours duquel on vous demande continuellement si vous voulez vraiment le faire. Le processus est long; il prend quelques semaines, voire des mois. Pendant ce temps, cela devient généralement un problème familial, et les amis interviennent aussi. Il y a de nombreux adieux, et de nombreuses interactions avec les amis qui insistent pour que le patient ne fasse pas ça. Il y a des pressions de la communauté, des pairs et de la famille pour ne pas le faire. Il faut un grand niveau de détermination et de courage pour se suicider dans ces conditions.
Ceux qui y sont résolus devraient avoir la possibilité de mettre fin à leurs jours.
Le Dr Poelnitz est psychiatre de St Clare’s Behavioral Health, New Jersey
** »Psychiatric Times » juin 2021
Source :
« Psychiatric Times – 30.07.21