Une étude soulève des doutes sur les connaissances de la population au sujet de l’aide médicale à mourir et autres pratiques de fin de vie
Ce contenu est produit par l’Université Laval.
Une étude menée par une équipe de l’Université Laval et du Centre de recherche de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec – Université Laval révèle qu’une proportion importante de la population ne semble pas être en mesure de dire clairement en quoi consiste l’aide médicale à mourir. Cette méconnaissance s’étendrait également à d’autres pratiques de fin de vie telles que la sédation palliative continue, l’abstention de traitement et le suicide assisté.
C’est le constat auquel est arrivé l’équipe dirigée par Diane Tapp, professeure à la Faculté des sciences infirmières de l’Université Laval et chercheuse au Centre de recherche de l’Institut, après avoir fait remplir un questionnaire sur les pratiques de fin de vie à un échantillon de 966 personnes. Ce questionnaire permettait notamment d’évaluer le niveau des connaissances à l’égard de diverses pratiques de fin de vie, qu’il s’agisse de procédures légales utilisées au Québec, comme l’abstention de traitement, ou de procédures interdites dans la province, tel le suicide assisté. Les répondants étaient âgés de 57 ans en moyenne et près de la moitié d’entre eux (45%) possédait un diplôme universitaire.
L’analyse des résultats a permis de constater que :
- 65% seulement des répondants ont été en mesure d’expliquer correctement en quoi consiste la pratique de l’aide médicale à mourir ainsi que son statut légal.
- 64% seulement des répondants ont été capables de déterminer que le fait de fournir un médicament à une personne pour qu’elle puisse mettre fin à sa vie au moment où elle le souhaite ne correspond pas à la définition de l’aide médicale à mourir et ne constitue pas une pratique légale au Québec. Il s’agit en fait d’un suicide assisté.
- 59% seulement des répondants ont été en mesure de déterminer qu’une demande anticipée d’abstention de traitement en cas d’inaptitude est une pratique légale, mais qu’elle ne constitue pas une aide médicale à mourir.
- 49% seulement des participants ont répondu correctement que la pratique qui consiste à mettre fin à la vie d’une personne inapte qui en avait fait la demande préalablement à son inaptitude ne fait pas partie des dispositions actuelles de la loi sur l’aide médicale à mourir.
- 45% seulement des répondants ont été capables de déterminer que le fait de provoquer un sommeil ininterrompu pour contrôler les douleurs d’une personne en fin de vie est une pratique légale sans toutefois constituer une aide médicale à mourir. Il s’agit d’une pratique appelée sédation palliative continue.
« Même si le taux de bonnes réponses est faible, nous pensons en fait que nos résultats surestiment le niveau de connaissance des Québécois au sujet des différentes pratiques de fin de vie, avance la professeure Tapp. Notre échantillon était composé de participants assez éduqués, qui avaient souvent accompagné quelqu’un en fin de vie et qui avaient accès à Internet. Si nous reproduisions la même étude avec des personnes moins scolarisées, par exemple, nous observerions probablement des taux de bonnes réponses encore moins élevés.»
« Les options de fin de vie et la préparation nécessaire pour y faire face se sont complexifiées dans les dernières années, poursuit la chercheuse. La population a maintenant des options à sa disposition et des moyens pour faire connaître ses choix, ce qui est excellent. Il faut toutefois s’assurer qu’elle connaisse bien toutes ces options disponibles ainsi que leurs implications. C’est pourquoi il est important de mieux informer l’ensemble de la population, incluant les personnes plus vulnérables de la société et celles qui n’ont jamais accompagné quelqu’un en fin de vie. »
Cette étude a fait l’objet d’une présentation lors du dernier congrès de l’Association canadienne de soins palliatifs. Elle a été codirigée par Gina Bravo, de l’Université de Sherbrooke, et cosignée par Ariane Plaisance, Julia Masella, Vincent Couture, Sophie Dupéré, Marie-Pierre Gagnon et Marianne Beaulieu, tous de l’Université Laval.
L’étude a été financée par le Réseau québécois de recherche en soins palliatifs et de fin de vie.
Source :
« Le Droit » 30.11.21