Durant cette semaine les interrogatoires des prévenus se sont poursuivis. Ils ont été suivis par le réquisitoire de la Procureure, puis par les plaidoyers des avocats. Les peines retenues seront annoncées le 9 janvier à 13h30 en séance publique.
Comme pour les semaines précédentes, vous trouverez le compte rendu détaillé de cette semaine. Tout au long du procès, ces comptes rendus ont été rédigés par Nathalie Andrews et Annie Wallet.
Lundi 29 septembre :
Ont eu lieu les interrogatoires de François Galichet, Guy Lechartier, Marie Christine Coilbault militants d’Ultime Liberté. Tous âgés de plus de 75 ans…
Il ne faut pas oublier que ces femmes et ces hommes sont poursuivis pour importation et acquisition de substances illicites – pas pour incitation ou aide au suicide. Si cela avait été le cas, ils auraient été poursuivis pour homicide et donc jugés aux assises ! Cependant Il n’y a eu aucun enrichissement personnel, ce ne sont pas des trafiquants ! C’est ce qu’ils ont démontré en répondant avec précision sur les faits qui leur sont reproché, mais en rappelant sans cesse les raisons humanistes et désintéressées de leur engagement.
Le devoir moral peut-il, dans certains cas, l’emporter sur la loi ?
François Galichet a enseigné toute sa vie la philosophie à l’université.
Agé de 82 ans, il est l’un des militants d’Ultime liberté jugés au tribunal de Paris.
« On l’a bien vu pour l’IVG : la légitimité, quelquefois, précède la légalité », affirme François Galichet entre deux références à Socrate et à Kant. « Nous souhaitons un cadre légal, nous ne souhaitons que ça ! », assure-t-il. Tout comme les autres prévenus, il assume la part d’illégalité de leurs actions, faites par solidarité. « À Ultime Liberté, on ne laisse personne sur le bord du chemin ».
François Galichet explique qu’ils ne tenaient pas à avoir une vraie comptabilité, mais s’il y avait une loi, ce serait possible.
La question de la concentration des doses :
Lors de son interrogatoire, Guy Lechartier, un autre bénévole d’UL explique que l’association avait envoyé un échantillon pour analyse en Espagne et que le laboratoire concerné avait dit que le produit était fiable.
Ce qui n’empêche pas la présidente du tribunal de lui demander : « Mais n’y avait-il pas un risque que la dose ne soit pas assez concentrée, ou frelatée ? » Réponse :« Le pentobarbital est létal à 6 grammes, mais nous, on conseillait aux gens de se commander 12 grammes. « Avec ça, pas beaucoup de risque de se louper. » Néanmoins, l’instruction a révélé un cas de suicide raté il y a 6 ans pour une personne souffrant de sclérose en plaques.
Le stockage des doses :
Le tribunal est revenu sur le devenir des doses expédiées et le risque que certains flacons aient pu être égarés .Le pentobarbital était expédié à travers le monde sous la discrète étiquette « Natural Cosmetics ». Une fois parvenues à leur destinataire, elle pouvaient rester des années au domicile du commanditaire, pas toujours pressé de se suicider, soit n’étant pas malade, soit rassuré par l’acquisition.
L’accompagnement des demandeurs :
Soucieuse d’éviter des poursuites, l’association demandait à ses bénévoles de ne pas commander à la place de la personne souhaitant mourir. Mais certaines avaient du mal avec un ordinateur – encore plus via une messagerie cryptée. « Une seule fois, j’ai enfreint la règle d’Ultime Liberté et passé commande moi-même, pour une femme hospitalisée et en grande détresse, reconnaît François Galichet. «Si je lui avais dit : « Débrouillez-vous toute seule », je ne pourrais plus me regarder dans la glace. »
« Les doses volantes, en cas d’urgence, à Grenoble, ça ne nous semblait pas nécessaire », assure Guy Lechartier. « On était tous capables de donner notre dose personnelle en cas de nécessité. Et puis, on sait que si on revend un produit interdit, on devient trafiquant. Cela fait partie des risques qu’on ne voulait pas prendre. »
En ce qui concerne Mme Marie-Christine Coilbault, il lui est reproché l’achat et la détention du produit pour une amie malade. Comme les autres prévenus, elle est convaincue que l’on doit pouvoir choisir quand et comment mourir. Marie-Christine, a aidé une femme âgée : « Son mari était mort depuis un an et elle n’a eu que des problèmes. Le fémur fracturé, cette femme a été opérée au moins six fois parce qu’elle a eu des complications à la suite de son hospitalisation. C’est vraiment avec véhémence qu’elle demandait le produit et qu’elle ne pouvait pas se procurer toute seule. C’était presque une supplique. »
Pendant leur interrogatoire, les prévenus s’expriment tranquillement, mais on les sent fatigués par ce procès qui dure.
Mardi 30 septembre :
Témoignage d’André Comte Sponville cité par la défense de Bernard Senet
André Comte Sponville penche sa haute silhouette à la barre, pour expliquer qu’il n’a jamais rencontré Bernard Senet. Mais il connaît son existence et son parcours – depuis un quart de siècle.
Le livre de Catherine Leguay, Mourir dans la dignité, quand un médecin dit oui, postfacé par lui publié chez Robert Laffont il y a vingt-cinq ans, en 2000, était consacré à l’expérience du docteur Bernard Senet.
L’estime que ce livre lui a inspirée pour ce médecin n’a cessé de croître, d’autant plus que celui-ci prenait des risques en violant une loi injuste, non par intérêt personnel, mais pour le bien de ses patients. Prendre des risques pour les autres, de manière désintéressée, c’est là le principe même de l’héroïsme, et, pour André Comte-Sponville, le docteur Bernard Senet est une forme de héros.
Il cite également l’exemple du professeur Léon Schwartzenberg qui avait pris des risques lui aussi. Célèbre oncologue, très médiatisé, il avait publié en 1985 Requiem pour la vie, un ouvrage en faveur de la légalisation de l’euthanasie. En 1991, l’Ordre des médecins le suspendit d’exercice pour un an, pour avoir révélé dans la presse, en 1987, l’euthanasie qu’il avait pratiquée sur un malade incurable. En 1993, le Conseil d’État annula cette décision.
L’estime qu’André Comte-Sponville porte à ces deux médecins repose sur leur courage, leur générosité et leur honnêteté. Ils n’ont pas menti : ils ont dit ce qu’ils faisaient ou avaient fait — contrairement à tant d’autres. Ils ont agi en bons médecins, en bons citoyens, en républicains sincères. Car il n’est pas sain, dans une démocratie, que la loi soit violée tranquillement, dans le secret.
S’il est favorable à l’euthanasie et au suicide assisté, c’est parce qu’il aime la vie et la liberté, et souhaite en conséquence que sa vie demeure libre jusqu’à son terme. Être maître de sa vie, c’est pouvoir l’être aussi de sa mort — du moins dans certaines circonstances, et si telle est sa volonté. Non qu’il tienne à mettre fin à ses jours tant que tout va bien, mais si tout allait mal — comme dans le cas d’un AVC, première cause de handicap — il souhaiterait pouvoir décider.
Philosophiquement, il se définit comme un libéral : pourquoi limiter ou supprimer sa liberté quand elle ne porte atteinte à celle de personne ?
Ce n’est pas, à ses yeux, un problème de dignité, comme le soutient parfois l’ADMD, mais une question de liberté.
Et en tant que républicain, il s’interroge : comment accepter une mort à deux vitesses ?
Il est revenu sur ces réflexions dans La Clé des champs. Le titre fait écho à Montaigne : « Le présent que nature nous ait fait le plus favorable, et qui nous ôte tout moyen de nous plaindre de notre condition, c’est de nous avoir laissé la clé des champs » (Essais, II, 3). Montaigne pousse même le raisonnement très loin : « La plus volontaire mort, c’est la plus belle. »
C’est spécialement vrai lorsque l’on souffre trop durement d’une maladie incurable. Montaigne rejoint sur ce point la plupart des anciens : « qu’il est temps de mourir lorsqu’il y a plus de mal que de bien à vivre ; et que conserver notre vie pour notre tourment et malheur, c’est choquer les lois mêmes de nature » (Essais, I, 33).
Il cite les philosophes antiques, les stoïciens, les épicuriens, et même Platon l’avaient compris : la question n’est pas de principe, mais d’opportunité — d’où le titre de son livre L’Opportunité de vivre.
Il dénonce l’argument absurde et odieux de ceux qui disent : « Vous avez choisi la mort, moi je choisis la vie. » Absurde, puisqu’ils mourront tout autant que quiconque ; odieux, car celui qui met fin à ses jours n’a pas été moins vivant que les autres, et parfois davantage.
La vie est à prendre ou à laisser, et la laisser, pour le sage, est encore une manière de la prendre. « Le grand motif de ne pas nous plaindre de la vie, écrit Sénèque, c’est qu’elle ne retient personne. Tout est bon dans les choses humaines dès que nul ne reste malheureux que par sa faute. La vie te plaît ? Vis donc. Elle ne te plaît pas ? Libre à toi de la quitter » (Lettres à Lucilius, 70, 12-15).
Épictète, plus serein, confirme :
« Songe que la porte est ouverte. Ne sois pas plus lâche que les enfants : quand la chose ne leur plaît pas, ils disent : “Je ne joue plus.” Toi aussi, quand tu crois être en semblable situation, dis “Je ne joue plus”, et va-t’en ; mais, si tu restes, ne gémis pas » (Entretiens, I, XXIV, 20).
Cette idée – « la porte est ouverte » – projette pour André Comte-Sponville une lumière de liberté sur toute notre existence.
Le suicide, rappelle-t-il, fait partie des droits de l’homme. En France, il n’est d’ailleurs pas un délit, comme l’avait souligné Robert Badinter.
A-t-on besoin d’un médecin ? Pas forcément, si l’on est en bonne santé. Il évoque Gilles Deleuze, atteint d’une insuffisance respiratoire sévère qui se jette par la fenêtre à 70 ans, en 1995, ou le psychanalyste Bruno Bettelheim, à 86 ans, qui, après la mort de son épouse et redoutant la dégradation de sa santé, se donna la mort le 13 mars 1990.
Tout le monde n’a pas de revolver, et c’est tant mieux, dit-il, en pensant à Romain Gary en 1980.
Mais que faire lorsque l’on est malade, hospitalisé, ou dépendant dans un EHPAD l’aide d’un médecin est nécessaire.
Le philosophe Francis Bacon l’avait déjà écrit en 1623 :
« L’office du médecin n’est pas seulement de rétablir la santé, mais aussi d’atténuer les douleurs et souffrances attachées aux maladies ; et cela non pas seulement parce que cet adoucissement contribue à la convalescence, mais afin de procurer au malade, lorsqu’il n’y a plus d’espérance, une mort douce et paisible ; car ce n’est pas la moindre partie du bonheur que cette euthanasie. »
Ce dernier mot, alors rare, Bacon l’empruntait à Suétone, qui décrivait ainsi la mort de l’empereur Auguste : « Sa mort fut douce, et telle qu’il l’avait toujours désirée… », une euthanasia, c’est-à-dire, en grec, une « bonne mort ». Et quel être humain ne se souhaite, pour lui et pour les siens, une fin semblable ?
Il ne s’agit pourtant pas, pour André Comte-Sponville, de rendre le suicide accessible à tous, ni de le banaliser. Le suicide fait partie des droits de l’homme, mais aussi, parfois, des pathologies. Il faut donc respecter ce droit quand il repose sur des raisons légitimes, tout en le prévenant ailleurs, en soignant les dépressifs et les désespérés. C’est pourquoi un accord médical reste nécessaire — mais dans le respect de la liberté du patient.
Nul besoin d’être en phase terminale, ni même atteint d’une maladie très grave, pour souhaiter pouvoir choisir sa fin. Il cite Le dernier soir de Thomas Misrachi (Grasset, 2024) évoquant le suicide assisté de Jacqueline Jencquel, ou encore Roland Jaccard, qui, sans être malade ni dépressif, choisit de mourir à 80 ans, pour échapper à la décrépitude de la vieillesse.
Bernard Senet, conclut-il, est en avance d’une loi. La France a peur de tout ce qui touche à la liberté . Il évoque les oppositions au moment du vote de la loi sur l’IVG et fait le parallèle avec la situation des femmes avant la loi sur l’IVG et une expérience personnelle avec l’association le MLAC, qui l’avait amené à aller à Londres avec son amie, tout comme il risque de devoir s’exiler en Suisse pour mourir. Il constate que les femmes, se sont sans doute mieux battues que les vieillards, mais conclut que « la République doit protéger les femmes autant que les vieillards».
Le projet de loi actuel représente à ses yeux un grand progrès par rapport à la loi Claeys-Leonetti, elle-même progrès par rapport à la situation antérieure, qu’il jugeait scandaleuse. Il appelle néanmoins de ses vœux une loi de liberté et d’égalité plus aboutie — Il regrette que les cas tels que celui de Vincent Humbert il y a 30 ans ainsi que les malades d’Alzheimer soient exclus de la loi future.
Pour lui, Bernard Senet a fait son travail de médecin. Et il confie qu’il aimerait beaucoup avoir, pour lui-même, un médecin aussi humain et humaniste que lui.
En réponses aux questions qui lui sont posées par les avocats de la défense le philosophe, estimant qu’une potentielle loi devra prévoir une clause de conscience.
Il souligne que les blocages viennent de l’état et non des français, à 80% favorables à une loi . Membre pendant huit ans du comité consultatif national d’éthique, il précise que les principales résistances viennent des religions monothéistes présentes en France . Il observe également une réticence du côté du corps médical, une partie des médecins considérant qu’ils n’ont pas fait médecine pour tuer des gens. Or, dans le suicide assisté le médecin ne fait que l’ordonnance», ajoute-t-il.
L’après-midi se poursuit avec l’interrogatoire des trois derniers prévenus :
Patrice Bernardo, référent d’Ultime Liberté en Haute-Garonne :80 ans
Yves Janvier 89 ans « le doyen des prévenus » comme le titre la presse
Nicole Ernest ancienne référente de l’ile de France Sud-Ouest 88 ans
Chacun à leur tour, debout à la barre, droits et dignes, ils vont répondre aux questions du tribunal avec calme et franchise. Ils rappellent qu’ils ont agi pour aider des personnes en détresse, dont les conditions de vie ne leur permettaient de pouvoir aller mourir en Suisse. Ils estiment ainsi avoir contribué à remédier à l’inégalité grandissante des citoyens en France, face à une mort à deux vitesses qui trahit la devise républicaine : Liberté, Egalité, Fraternité ; devise qu’ils essaient de faire vivre dans ces actes de solidarité.
Jeudi 2 octobre :
« Douze petits vieux » face aux réquisitions du Tribunal :
La question préjudicielle plaidée par l’un des avocats d’Ultime Liberté est rejetée par le tribunal
Avant d’entendre les réquisitions de la Procureure, l’un des avocats d’Ultime Liberté plaide une question préjudicielle sur l’interdiction de la circulation du pentobarbital en France, l’objectif est de suspendre le procès pour le renvoyer devant la cour de justice européenne.
Le pentobarbital étant employé à usage vétérinaire en France, le tribunal conteste qu’il y soit totalement interdit .Par ailleurs, dans les autres pays européens dans lesquels il est utilisé pour des euthanasies humaines sa circulation et son usage sont strictement contrôlés, soumis à un avis médical préalable la question est donc rejetée.
Le réquisitoire de la Procureure :
Celle-ci revient aux faits reprochés de circulation illicite du pentobarbital, classé en tant que psychotrope dans les substances vénéneuses, les drogues telles que l’héroïne, la cocaïne font partie d’une autre classe de produits . Dans un long réquisitoire elle reconnait que le « trafic » n’a pas donné lieu à des transactions commerciales dont les prévenus auraient tirer bénéfice pour un enrichissement personnel, pour proposer des peines d’emprisonnement avec sursis allant de trois mois à 18 mois pour l’ex-présidente d’UL, Claude Hury . Elle justifie ses réquisitions par le fait que les prévenus ont aidé les personnes, soit à commander le produit, soit les ont assistées dans la prise du pentobarbital.
A la surprise générale, pour le docteur Bernard Senet elle demande une peine de 12 mois d’emprisonnement avec sursis, assortis de trois ans d’interdiction d’exercer, dont deux avec sursis, alors qu’elle reconnait comme seul chef d’inculpation, le fait, dans certains cas notés dans le dossier d’instruction, d’avoir communiqué une adresse mail.
La plaidoirie des avocats
Ont suivi les plaidoiries des avocats de deux des douze petits vieux : Mr Yves Janvier et Mme Nicole Ernest :
C’est l’avocate de Nicole Ernest qui a présenté les prévenus sous ce vocable, mettant en évidence leur absence de dangerosité, par rapport à de dangereux trafiquants de drogue
Un fait surprenant : la destruction de la majorité des flacons saisis
Les deux avocats ont mis en évidence un fait surprenant : l’ensemble des 146 bouteilles saisies n’a pas fait l’objet d’une analyse chimique prouvant que chacune contenait bien du pentobarbital, 12 flacons seulement ont été testés, ce qui constitue un très faible échantillon.
Alors, sur quels faits repose l’accusation ?
La majorité des flacons a été détruits, impossible maintenant d’apporter la preuve qu’ils contenaient bien du pentobarbital. Les quelques flacons qui ont été conservés n’appartenaient pas aux onze prévenus (le docteur Senet n’en ayant jamais acquis). Comment prouver que les flacons saisis chez les prévenus contenaient du pentobarbital ?
125 acheteurs identifiés, mais seulement douze prévenus ?
Pourquoi douze personnes ont-elles été mises en examen ? n’y a-t-il pas des éléments arbitraires dans le choix de ces personnes ?
À la suite du signalement des autorités américaines seule la France a poursuivi ses citoyens :
Les avocats ont souligné qu’aucun des trois autres pays dans lesquels le signalement avait été effectué ( Allemagne Espagne, Suède ), n’avait déclenché de poursuites judiciaires.
Vendredi 3 octobre :
Dernier acte ? Plaidoiries des avocats d’Ultime Liberté et de l’avocate du Dr Senet
Ce vendredi 3 octobre, une petite salle pour les plaidoiries des deux avocats d’Ultime Liberté et de l’avocate du Dr Bernard Senet. Si exigüe que des gens doivent s’installer dans l’auditorium du tribunal… avec un problème de sono qui les empêchent d’entendre le déroulement de l’audience…
Maître Laurence Bedossa, avocate de Bernard Senet, cite de nombreux témoignages positifs pour son client âgé de 77 ans et malade, même si « comme beaucoup d’hommes, il a tendance à vouloir cacher son état et sa fatigue ». Elle rappelle que le Conseil de l’ordre, ou autre juridiction, ne l’a jamais poursuivi et s’étonne que la procureure ait demandé non seulement une peine de prison avec sursis contre lui, mais aussi une interruption d’exercer à son encontre. Pourquoi, pour l’empêcher de continuer à s’exprimer ? Cela fait 50 ans que Bernard Senet exerce la médecine, 40 ans qu’il défend le droit de chacun de choisir sa fin de vie dans la dignité. Un livre a été écrit sur lui en 2000, préfacé par Henri Caillavet avec une conclusion d’André Comte-Sponville
On veut le faire passer pour un médecin irresponsable ? Un rappel des personnes venues témoigner pour lui semble nécessaire :
S’ensuit une longue et riche énumération :
Ceux qui ont fait le déplacement du Vaucluse, du prêtre venu en voiture du Tarn et qui risque des problèmes avec sa hiérarchie
Le docteur Guillemot qui a expliqué qu’il avait pratiqué des euthanasies à l’hôpital et qu’il n’était pas le seul,
Francois de Closets qui le connait depuis le -temps où il a fait des reportages sur ce sujet,
Jean-Louis Touraine qui l’a auditionné à l’Assemblée nationale en 2020,
Denis Labayle qui a participé avec lui à la création de l’association le Choix
…enfin André Comte-Sponville.
Ils sont tous venus témoigner pour lui et disent tous la même chose de lui : Comme tous ceux qui ont rencontré Bernard Senet :
« c’est un homme exceptionnel, un médecin qui écoute, qui prend son temps, un humaniste désintéressé. Sa vie tout entière est consacrée aux autres, il est président d’une association Alzheimer, il s’occupe des migrants, il milite pour le choix d’une mort digne. Il est président du MRAP dans le Vaucluse.
Si les opposants refusent une loi sur l’aide médicale à mourir, le Dr Senet lui n’est pas opposé aux soins palliatifs.
Alors que le Procureur a dit qu’un avis médical était nécessaire, le fait d’être médecin, lui semble être une circonstance aggravante !
D’autres cas sont cités pour lesquels le Procureur estimait qu’il ne s’agissait pas de maladies mortelles…(cancer du pancréas, cancer des os), alors que les personnes concernées en sont mortes
Il est bien évident que c’est le procès de la fin de vie qui a lieu et pas un autre. Nous sommes dans une société en plein bouleversement et la justice se trouve confrontée à des dysfonctionnements des hommes et femmes politiques.
C’est la raison pour laquelle on attend beaucoup de la justice, qui, de tout temps, sauf dans les périodes les plus sombres, fait partie de la société, elle est rendue par des femmes et des hommes qui vivent dans cette société. La justice est rendue au nom du peuple français et elle doit prendre en considération ce peuple français… Maître Bedossa rappelle que compte tenu de l’échec des politiques, partis en déshérence, c’est à la justice qu’il est demandé de prendre en considération l’évolution de la société, l’état des personnes, juste pour mettre un peu d’humanité et d’équité comme le fit Salomon, en tranchant entre les deux mères qui revendiquaient l’enfant
Est-ce qu’il y a des victimes ? il y a l’Ordre des pharmaciens dont l’intérêt à agir est discutable et discuté. Mais il y a-t-il des victimes qui soient venues se plaindre et attaquer le docteur Bernard Senet. ? NON !
Mais s’il n’y avait que du juridique et si ce n’était pas du suicide assisté dont on parlait, les auteurs des achats de pentobarbital auraient tous été renvoyés devant le tribunal il y en avait 125, pour 130 flacons saisis ? Alors pourquoi si peu de prévenus dans cette salle ? Du reste le procureur ayant l’opportunité des poursuites, il est difficile de comprendre pourquoi certains ont été renvoyés devant le tribunal et pas d’autres, choix totalement discrétionnaire et non motivé, comme il peut le faire, mais qui ne manque pas de poser question.
Ceci donne l’impression qu’on a simplement voulu « renvoyer » un médecin.
La justice – a dit le Procureur en début d’audience – est là pour condamner elle n’est pas là pour prendre en considération l’état de la société. On ne fait que du droit. Mais on dit aussi que le droit est flexible.
Quoique qu’en dise le Parquet, c’est bien le procès du suicide assisté que le procureur vous demande de faire.
Ensuite Me Bedossa a demandé de relaxer le docteur Bernard Senet pour les motifs invoqués dans les conclusions.
- Pas d’infraction principale, pas d’intention, pas d’aide à l’installation de quoique ce soit. Il a transmis une adresse dont rien ne démontre qu’elle est cryptée à quatre personnes.
- Cette adresse est disponible sur internet et le procureur n’a pas démontré le contraire.
De plus, en ce qui concerne le livre « La pilule douce » on peut l’acheter sur Amazon… - Il n’a pas concouru à une infraction : il a aidé au suicide assisté.
- Or comme le suicide n’est plus une infraction on le renvoie sur la base d’une qualification, sans fondement.
Si certains n’évoquent pas leur maladie dans leurs auditions, on ne peut mettre en doute les propos de Bernard Senet.
Globalement, les gens ont eu ses coordonnées, soit par l’ADMD, soit par France 5.
Il a communiqué une adresse qu’en fait, avec un peu de recherche, on peut trouver sur internet. Il a donné cette adresse dans des conditions précises et après s’être entretenu avec ces personnes et avoir consulté leur dossier médical.
Ces personnes ont commandé librement volontairement et sans intervention extérieure le produit sur internet.
Son avocate rappelle qu’environ 90% des Français sont favorables à une loi sur l’aide médicale à mourir et il lui semble qu’actuellement une tolérance est nécessaire en attendant le vote de cette loi. Respect et amour sont dus à ces personnes âgées, malades ! Les religions, opposées à l’IVG, à la fin de vie et au mariage pour tous, n’ont rien à voir. Laissons les êtres humains choisir leur fin de vie.
L’avocate de Bernard Senet conclut ainsi :
« La loi doit changer ! Vous pouvez l’humaniser. Soyez des juges courageux, vous serez critiqués de toutes les façons. Je vous demande de relaxer Monsieur Senet de cette infraction insensée »
Maîtres Frédéric Verra et Arnaud Levy-Soussan, avocats d’Ultime Liberté, ont plaidé à leur tour en expliquant que leurs clients s’étaient exprimés au long de ce procès. Leur enjeu étant d’expliquer pourquoi ils se battent, certains ont même dormi en geôle, à leur âge et certains avec des problèmes de santé. Aucun d’entre eux n’a de casier judiciaire, ce sont des femmes et des hommes honnêtes et respectables, pour souiller ce casier par une peine ? Nous constatons, disent les avocats, que l’audience a été utile, les prévenus ont reconnu leur culpabilité : c’était une mauvaise initiative d’avoir eu une dose volante à Toulouse et ils n’ont pas continué cette pratique. Le procès nourrit la réflexion des citoyens. Ces femmes et ces hommes ont pu aider des personnes en grande souffrance, des familles ont été rassurées de voir leurs proches mourir sereinement comme voulu Ultime Liberté et ses militants sont là pour les accompagner. C’est le cœur de cette association.
Il ne leur est pas reproché l’accompagnement, le protocole, UL n’a jamais été poursuivie en qualité de personne morale, ni pour non-assistance à personne en danger, pas poursuivie non plus pour provocation au suicide, pour publicité ou apologie ou propagande.
Curieusement, les avocats d’Ultime Liberté ont remarqué que ce dossier porte le nom « Nembutal »… Pourquoi pas « Ultime Liberté » ? Pourquoi pas « Nitrite de sodium », s’ils l’avaient utilisé ?
Aucun pays, après avoir reçu des informations des douanes américaines, n’a engagé de poursuites, sauf la France ! Sur toutes les personnes perquisitionnées, pourquoi ce choix arbitraire des personnes poursuivies ? Est-ce dire que cette association doit être dissoute et aux militants qu’il est interdit de militer ?
A Ultime Liberté, face à la souffrance humaine, chacun fait ce qu’il pense devoir faire. UL a certainement sauvé des vies par les visites reçues et les échanges avec les accompagnants
Il est rappelé que 80% des acheteurs ont plus de 70 ans, pas de médecin chez UL certes, mais des personnes raisonnables. Si des gens avaient voulu se plaindre de l’association, ils auraient pu se porter partie civile à ce procès.
L’état de nécessité est rappelé par l’un des avocats : danger actuel ou imminent, absence de faute, nécessité de l’acte et proportionnalité entre le moyen employé et la gravité de la menace à éviter. Ces 9 personnes avaient certainement mieux à faire que d’être au chevet de personnes souffrantes et se battre pour une loi, mais elles l’ont fait. Personnellement, dit l’avocat, je trouve très bien que des personnes comme elles existent !
« Réveiller les consciences, ouvrir la réflexion »
Le deuxième avocat d’Ultime Liberté évoque la question préjudicielle liée aux produits vénéneux et les médicaments (convention de Vienne), le Parquet a dit que la législation européenne n’est pas concernée car le produit venait d’un pays tiers (non U.E.). Ce n’est pas un sujet qui concerne le procès actuel. Il n’y a pas d’atteinte déontologique et le produit n’est pas vendu dans les officines
En ce qui concerne la recevabilité de la partie civile…pour un préjudice actuel et direct, au moment du débat sur l’IVG, l’Ordre des médecins voulait contester et cela n’a pas été possible. Exercice illégal de la pharmacie ? Ce n’est pas recevable dans l’hypothèse de ces prévenus, l’Ordre des pharmaciens n’est pas Zorro et n’a subi aucun préjudice… Il faut écarter toute demande de sa part.
L’avocat rappelle quelques cas de jurisprudence et rappelle que la magistrature honore ceux qui tranchent humainement. Les juges sont libres. Il dénonce certains points et rappelle qu’alors que la société est en train de craquer sur cette question de la fin de vie, on prend quelques lampistes pour faire un exemple.
Certains prévenus ne supportent plus d’être dans l’illégalité, n’oublions pas qu’il y a quelques siècles les exécutions étaient faites en public, au fil du temps, on a fini par les faire à l’ombre derrière un mur de prison.
On évoque un possible problème de mise au point du contrôle de qualité chez UL qui aurait favorisé un trafic international, alors qu’un dealer en banlieue gagne 10000 Euros par jour, on cite un gain international de 300000 Euros pour l’affaire en cause. Mais combien a coûté cette procédure qui dure depuis des années ?
En France, le suicide violent et solitaire n’est pas punissable, contrairement au suicide assisté alors que nos animaux bénéficient du Pentobarbital !
La plaidoirie s’achève sur ces paroles : pour que ce procès ait un sens, il ne doit y avoir aucune condamnation.
Nous espérons que les cinq avocats qui ont représenté les différents prévenus, du 15 septembre au 3 octobre, soient entendus par la Justice.
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Merci d’avoir envoyé des comptes-rendus du procès de Bernard Senet et UL. J aurais voulu y assister mais je ne peux plus me déplacer seule. Je suis une vieille amie de B.Senet et j’aurais pu aussi me trouver aussi parmi les accusés car il y a bien longtemps j’ai cherché du pentobarbital à Bruxelles auprès de l’ADMD belge pour aider une personne ayant la maladie de Charcot à mourir .sous contrôle d’un médecin de l’ADMD le Dr. Guilhot mais sans avertir l »association.
J’espère que tout les accusés de ce stupide procès seront acquittés et que la loi sur la Fin de Vie pour l.ultime Liberté sera enfin votée.Françoise Steller
Bonjour, il nous semblait logique et indispensable de diffuser les comptes-rendus des audien ces, qu’elles concernent le Dr Senet ou les autres prévenus. Il faut espérer que tous ces « cheveux blancs » repartiront soulagés après la dernière séance du 9 janvier 2026. Même au vu de la situation politique dans laquelle se trouve ntore pays ces jours-ci, ne baissons pas les bras pour obtenir une loi d’humanité
bonjour .
merci pour tout votre travail autour de ce procès .En tant que militant UL j’aurais voulu être présent mais mon cancer n’était pas d’accord .Cette cause dédramatisant une mort qui nous est confisquée est un élément de « notre corps nous appartient ».
merci encore a tous les militants de nos associations .
Bonjour,
Tout au long du procès,nous avons essayé d’informer au mieux et vous remercions pour votre commentaire.
Bon courage à vous
Lisbeth
Un grand merci pour la peine que vous prenez pour nous transmettre ces comptes-rendus du procès. Toute ma gratitude à ces personnes courageuses injustement mises en cause.
Il y a plusieurs années, ma tante chérie a pu éviter de plus grandes souffrances et décider de son départ -à plus de 90 ans- grâce au produit qu’elle s’était procuré et qu’elle avait gardé précieusement pour le jour où… Elle aurait pu être parmi ces accusés!
Et bien sûr toute ma gratitude et mon souvenir reconnaissant au docteur Bernard Senet que j’avais accueilli à Tarbes il y a plus de 10 ans pour une conférence, à l’époque dans le cadre de l’ADMD…
J’espère que le tribunal s’honorera de rendre une justice pleinement humaine.
Bonjour Madame, nous vous remercions pour vos remerciements et vos paroles pleines de sagesse. Nous transmettons au Dr Senet. Effectivement, il faut espérer qu’aucune des personnes concernées n’ara de condamnation…attendons le 9 janvier