L’association nationale « Le Choix citoyens pour une mort choisie » a été présentée par Elisabeth Manfreo, nouvelle référente Isère de l’association, qui explique rapidement ses objectifs et le fonctionnement local de la délégation IsèreLeChoix.
La première présentation a été faite par le professeur Pierre-Simon Jouk médecin généticien au CHU de Grenoble, et actuellement médecin directeur adjoint de l’Espace de Réflexion Ethique Auvergne Rhône-Alpes.
En faisant le parallèle avec les différentes étapes ayant permis des décisions sereines autour des interruptions volontaires de grossesse pour motif thérapeutique, il souligne l’importance d’un dialogue clair et loyal entre les médecins et les patients, ainsi qu’entre les professionnels de santé concernés (médecins et autres professionnels de santé). Les termes autorisant la pratique d’une interruption médicale de grossesse, à savoir « forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable », sont des recommandations largement sujettes à appréciation. Tout comme les termes de la loi de 2016 autorisant la pratique d’une sédation profonde et continue jusqu’au décès, à savoir « patient atteint d’une affection grave et incurable » et « souffrance insupportable ». De la même manière la loi ne précise pas ce que sont des directives anticipées inappropriées, laissant une grande marge d’interprétation au médecin.
L’échange entre professionnel de santé et patient est un processus long et difficile, mais c’est lui, et non pas une information seule, qui peut aboutir à ce que des décisions puissent être prises en respectant les volontés du patient. Les deux situations : i) décision d’une sédation profonde et continue jusqu’au décès et ii) considérer des directives anticipées inappropriées sont soumises à la mise en place d’une procédure collégiale pluriprofessionnelle. Cette procédure collégiale se doit de réunir au moins deux médecins, dont le médecin ayant pris en charge le patient et qui reste le coordonnateur de cette procédure, et un autre médecin extérieur au service ou à l’hôpital. En réponse à la question d’un médecin généraliste, il est précisé que le médecin généraliste du patient devrait dans tous les cas pouvoir participer à cette procédure collégiale. De la même façon il est souhaitable que d’autres professionnels de santé, faisant partie de l’équipe de soins et qui connaissent bien le patient, puissent également y participer.
La deuxième présentation a été faite par le docteur Heddi Bouti, médecin généraliste et médecin coordonnateur en Ehpad. Il a détaillé les raisons qui peuvent amener une personne à rédiger ses directives anticipées ainsi que les modalités pratiques (formulaires) qui peuvent aider à les rédiger. Les directives anticipées devraient idéalement être rédigées avant l’entrée en Ehpad, car l’entrée en Ehpad constitue un moment de vie trop stressant pour imaginer que des personnes/patients puissent les rédiger de bonne manière à ce moment-là. Selon la loi tout médecin est tenu « d’informer ses patients de la possibilités et des conditions de rédaction de directives anticipées ». L’intérêt d’un formulaire peut en être la facilité d’utilisation par comparaison avec l’exercice difficile de s’exprimer devant une feuille blanche. Force est de constater que l’attitude devant le « parler de sa mort » reste très variable d’une personne à l’autre. H Bouti insiste aussi sur le fait que rédiger ses directives anticipées est une démarche qui peut aider les soignants dans leur rôle de soins et de délivreur de traitement, ce document leur étant opposable d’ailleurs dans leur pratique, mais en aucun cas cette rédaction ne doit être rendue obligatoire. Parfois il suffit d’être juste simple dans la façon d’exprimer.
La nécessité d’abandonner la quête d’immortalité de tout un chacun a également été évoquée. L’information est donnée sur la possibilité de renseigner depuis peu (Février 2022) ses directives anticipées dans le dossier informatisé de « Mon espace santé ». En cas d’urgence les médecins du SAMU auront accès automatiquement aux directives anticipées (procédure « bris de glace ») si celles-ci ont été enregistrées dans ce dossier informatisé. De la même façon pour les patients porteurs d’une maladie grave évolutive nécessitant des soins palliatifs, une fiche de recueil intitulée « Urgence Pallia » est disponible, avec une annexe qui peut contenir par exemple des prescriptions anticipées et un projet de soins. L’intérêt de cette fiche est d’optimiser l’orientation des patients âgés en fin de vie vers une structure de prise en charge adaptée à leurs volontés.
Au total, le constat est fait que l’on dispose de très peu d’informations sur l’intérêt réel des directives anticipées, à la fois pour les médecins/professionnels de santé et pour les patients, ce qui est très dommageable. De la même manière il est très difficile d’obtenir des informations sur le nombre de procédures collégiales pratiquées chaque année dans un établissement de santé, que ce soit pour la mise en place d’une sédation ou d’un arrêt de traitement ou pour le non-respect des directives anticipées. Ces procédures ne font pas l’objet de contrôle ni d’évaluation, et il n’y a pas de moyen financier spécifiquement destiné à cette surveillance. Même si la mise en pratique « dans la vie de tous les jours » de ces directives anticipées n’est pas optimale, leur intérêt pour les professionnels reste cependant majeur, notamment pour toutes les situations qui ne trouvent pas de réponse satisfaisante dans la loi de 2016.
Participants à cette réunion : des adhérents de IsèreLeChoix, des invités, des professionnels de santé, 80 personnes ont participé.