Cet amendement au projet de loi C-7 a été approuvé mercredi lors d’un vote où 47 sénateurs se sont prononcés pour et 28 contre. Il y a également eu huit abstentions.
La sénatrice Pamela Wallin, membre du Groupe des sénateurs canadiens qui a proposé l’amendement, a fait valoir que la loi piège actuellement les Canadiens dans « une loterie de diagnostic perverse ». Une personne diagnostiquée avec un cancer incurable peut recevoir une aide à mourir, a-t-elle noté, mais une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer ou d’autres troubles cognitifs peut avoir déjà perdu la capacité mentale de consentir au moment du diagnostic.
« En tant que personne ayant des antécédents de démence dans ma famille, je recherche la tranquillité d’esprit qu’une demande préalable et un consentement à cet égard apporteront », a-t-elle plaidé devant le Sénat.
« Je ne suis certainement pas la seule avec cette conviction. La majorité des Canadiens sont parvenus à la même conclusion. »
Donner aux gens la possibilité de faire des demandes écrites à l’avance, en précisant quand ils voudraient recevoir une aide à mourir, « donnerait à ceux qui craignent de perdre leur capacité consciente la certitude qu’ils peuvent accéder à l’AMM (aide médicale à mourir) avant d’atteindre un moment où le consentement n’est peut-être pas possible », a-t-elle expliqué.
Le projet de loi C-7 élargirait l’aide médicale à mourir aux personnes dont la mort naturelle n’est pas raisonnablement prévisible. Il établirait des règles d’admissibilité plus souples pour ceux qui sont proches de la mort, comprenant une forme limitée de demande préalable et des règles plus strictes pour ceux qui ne sont pas admissibles.
Pour les personnes proches de la mort qui ont consenti et ont été approuvées pour l’aide médicale à mourir, elles seraient exemptées de l’exigence de donner leur consentement final immédiatement avant que la procédure ne soit effectuée. Cette mesure vise à faire face aux situations dans lesquelles une personne perdrait sa capacité mentale après avoir été approuvée pour l’aide à mourir.
L’amendement de la sénatrice Wallin étendrait cette renonciation au consentement final aux personnes qui ne sont pas proches de la mort.
Un débat émotif
Même les nombreux sénateurs qui se sont opposés à l’amendement de Mme Wallin étaient favorables à son objectif.
Le sénateur Marc Gold, le représentant du gouvernement au Sénat, était ému lorsqu’il a exprimé son admiration pour le plaidoyer « passionné et raisonnable » de Mme Wallin.
Mais il a affirmé que le Sénat n’avait pas étudié la question parce qu’elle n’était pas incluse dans le projet de loi. Au cours des audiences du comité, il a déclaré que les sénateurs avaient entendu à maintes reprises que même des changements mineurs au régime d’aide médicale à mourir ne devraient pas être précipités et devraient être étudiés profondément.
« Nous n’avons tout simplement pas correctement examiné les ramifications et les effets de cette proposition et ce serait — et je le dis respectueusement parce que je suis touché et ému par cela — il serait irresponsable de présenter cela comme un amendement au C-7 », a-t-il soutenu.
Cependant, la sénatrice Frances Lankin, membre du Groupe des sénateurs indépendants, a rétorqué que chaque province et territoire avait déjà des règlements en place pour permettre aux gens de donner des directives anticipées sur les traitements de fin de vie, notamment en refusant des efforts héroïques pour les maintenir en vie avec des tubes d’alimentation, par exemple.
« Cet amendement […] s’appuie sur tout cela », a-t-elle souligné.
Le sénateur Jim Munson, membre du groupe progressiste du Sénat, a dit qu’au départ, il avait eu l’intention de s’abstenir sur l’amendement de Mme Wallin. Mais après avoir écouté le débat, lors duquel des sénateurs ont raconté leurs expériences déchirantes avec des membres de leur famille atteints de démence qui sont morts à l’agonie, il a conclu : « Je pense que parfois le Sénat doit prendre l’initiative et forcer le débat. »
Un amendement conservateur rejeté
Les sénateurs ont rejeté un autre amendement, proposé mercredi par le leader conservateur au Sénat, Don Plett, qui aurait criminalisé le fait qu’un médecin discute de l’aide médicale à mourir avec un patient, à moins que celui-ci n’ait d’abord soulevé le sujet.
- Plett a fait valoir que son amendement aiderait à atténuer l’inquiétude des personnes handicapées qui se sont plaintes de se sentir obligées de recevoir l’aide médicale à mourir.
Mais d’autres sénateurs ont soutenu que les médecins et les infirmières avaient l’obligation professionnelle de discuter de toutes les options disponibles avec leurs patients.
L’amendement du sénateur Plett a été rejeté par 66 voix contre 18, avec une abstention.
Source :
« La Presse » Joan Bryden – 10.02.21