Compte-rendu d’une entrevue entre Clément Mazaleyrat, étudiant à l’ESCAET, et Mmes Nathalie Andrews et Annie Wallet, coprésidentes du Choix
La réunion a abordé plusieurs aspects liés à l’aide médicale à mourir, notamment les activités de l’association Le Choix, les défis législatifs en France et les expériences à l’étranger. Les participants ont discuté de l’importance de l’accompagnement des patients et des familles, ainsi que des coûts et des processus impliqués dans l’aide à mourir. La conversation a également porté sur les perspectives, y compris la possibilité de créer un organisme centralisé pour la planification de fin de vie et l’importance de la formation des médecins dans ce domaine.
Si Clément Mazaleyrat, qui étudie dans le tourisme à l’ESCAET, a utilisé le terme « tourisme », c’est uniquement dans un cadre strictement académique et sociologique, pour désigner le déplacement de personnes contraintes de franchir des frontières afin d’accéder à un droit qui leur est refusé dans leur pays d’origine. Il ne s’agit en aucun cas de minimiser la gravité de ces situations, ni de les assimiler à une quelconque logique de loisir ou de consommation.
Il a commencé à s’intéresser à la question des soins palliatifs et de l’aide active à mourir il y a maintenant trois ans, lorsque dans le cadre d’un projet d’étude, portant sur la conception d’un projet “touristique” futuriste, il a eu l’idée de créer un service de SP sur la Lune pour y finir sa vie…ce qui l’a amené à faire des recherches entre autres sur les associations suisses. Maintenant en dernière année de master, il a décidé de centrer son mémoire sur cette question : « En quoi le développement du tourisme lié au suicide assisté reflète-t-il une évolution des besoins de société face aux enjeux de fin de vie ? » et eut l’opportunité d’échanger avec des représentants de Dignitas (dans le cadre de son mémoire Dignitas lui avait recommandé de contacter Le Choix), EXIT-ADMD Suisse romande et en France avec l’ADMD et d’autres associations liées aux soins palliatifs. Ces entretiens lui ont permis d’enrichir sa compréhension des enjeux juridiques, éthiques et humains liés à la fin de vie, mais également intégrer des perspectives plus citoyennes, militantes et incarnées dans la réflexion lui semblait indispensable. C’est ainsi qu’il s’est tourné vers notre association, notre éclairage lui donnant une vision complémentaire pour son travail de recherche.
Cet entretien a donc eu lieu dans le cadre de son mémoire. Trois parties-projet particulier-plus une série de questions sur le Choix, nos actions, puis une fois la loi votée, de quoi sera fait le futur…
A contacté différentes associations dont certaines liées aux soins palliatifs
Ce projet nous semble très intéressant et inhabituel, il est important que des jeunes en bonne santé s’informent sur cette question de fin de vie.
Annie Wallet coprésidente investie depuis 2020, a beaucoup milité dans les droits des femmes et s’est intéressée philosophiquement à ce sujet. Motivation plus personnelle, mère morte de façon dramatique, Annie s’est promis que ce type de morts ne se reproduise pas. Liberté individuelle essentielle, IVG, Mariage pour tous et elle estime que dans une société laïque chacun doit choisir sa fin de vie selon ses valeurs et mourir sereinement.
Nathalie Andrews est investie depuis 25 ans dans le monde associatif, 15 ans administratrice à l’ADMD Belgique et au Choix depuis sa création. Elle accompagne depuis des années des compatriotes en Belgique et en Suisse. A ses yeux, il est essentiel que le choix de fin de vie soit respecté, alors qu’avec la loi Claeys-Leonetti, nous n’avons malheureusement seulement quand nous approchons de l’agonie droit à une sédation profonde et terminale. Alors que dès que nous recevons un diagnostic incurable : Charcot, Parkinson, Alzheimer, entre autres, nous devrions pouvoir choisir de partir si telle est notre décision. Elle respecte ceux qui ne pensent pas comme elle, mais avoir le choix est essentiel
Clément s’est intéressé à 2 associations liées à l’aide active à mourir en France , pour lui l’association Le Choix semble plus investie dans l’accompagnement direct en Suisse que l’ADMD qui lui parait plus investie dans la proposition de loi, et reconnaît que les deux servent la même cause.
Nous recevons chaque jour des demandes de personnes en situation sans issue soit âgées avec des polypathologies, soit une maladie incurable, qui cherchent une issue à l’étranger. Recevoir les éléments médicaux et s’assurer de la volonté de la personne est indispensable avant de proposer le dossier à des associations suisses ou des médecins belges. Si la demande est recevable, nous les mettons en contact. Suivant sa région de résidence, nous proposons le pays qui serait le plus pratique au niveau déplacement, nous pensons au confort de la personne. Récemment, une femme est venue de Paris jusque Bruxelles en ambulance, il est inhumain de ne pouvoir mourir chez soi ! Nous restons en contact avec elle pendant toute la procédure, si personne ne peut aller avec elle (famille, amis…) un volontaire ou médecin du Choix peut l’accompagner.
Pour rappel en Suisse, l’on parle de MVA mort volontaire assistée. Belgique, Luxembourg, Pays -Bas utilisent le terme euthanasie…
Problèmes données chiffrées, Zurich, par exemple les hôtels. D’où viennent les demandes ? De partout, même de Russie, Chine, Inde. Pour des personnes habitant à des milliers de kms nous orientons vers une association plus proche de leur pays, nous recevons également des demandes déraisonnables, auxquelles nous ne pouvons donner suite… Parmi les femmes et les hommes qui nous contactent, nombre de personnes sont déjà en soins palliatifs, mais n’en peuvent plus et c’est pourquoi ils s’adressent à nous.
Frais hors voyage et hôtels (demandeur et famille accompagnant) en Suisse (crémation incluse) entre 9500 et 12000 Euros, Dans ce pays, hôtels et repas coûtent cher.
Pour la Belgique. hors déplacements et frais sur place, il faut compter avec les consultations des médecins, l’hôpital et la crémation environ 6500 Euros.
Certains frais quand on va mourir en Belgique pourraient être pris en charge via la carte européenne de sécurité sociale, par exemple faire prendre en charge les consultations médicales, peut-être l’hospitalisation. Le certificat de décès en cas d’euthanasie, porte la mention « mort naturelle liée à la pathologie », quelqu’un peut donc aller en Belgique pour un dernier voyage et là-bas son état s’aggrave… Il arrive que la sécu contacte le médecin belge demandant de quoi est morte la personne.
A l’avenir, si la proposition de loi est votée, quel avenir pour le Choix ? La loi sera assez restrictive, certaines pathologies n’entreront pas dans le cadre : maladies chroniques, pas incurables, etc., donc oui nous nous attendons malheureusement à avoir des malades qui continueront à vouloir notre aide car leur demande sera refusée en France et n’en pouvant plus.
Olivier Falorni a essayé de négocier avec Bayrou, mais celui-ci a insisté pour que les deux lois soient votées le même jour. Le Choix a été auditionné le 1er avril 2025, tout comme plusieurs d’entre nous ont pu l’être depuis quelques années.
Une association telle que la nôtre aura toujours une utilité. Pourquoi ? Nous nous battrons pour faire évoluer la loi. De plus au Choix, nous avons une commission médicale très active et nous formerons les soignants aux questions nécessaires, avec des médecins-conseil qui serviront de 2e avis par exemple. Actuellement, les directives anticipées ne sont pas contraignantes et nous le voudrions, ces D.A., nous les conservons déjà pour certains adhérents. . Si demain, la personne de confiance de Mme Y.. n’a plus sa Directive anticipée, nous pouvons en fournir une copie après vérification de l’identité de la personne en demande. Nous éditons des livres, entre autres le « Guide 2 en 1 »destiné aux personnes en demande d’aide à mourir et à leurs familles. Ce guide a également été envoyé aux parlementaires.
Planification sur la fin de vie, thanadoulas,etc., pertinent de créer des parcours de fin de vie pour qu’elles puissent préparer le deuil d’un proche ? Comment et cela aurait-il du sens ?
Notre psychologue répond aux questions soit des personnes, soit de leur famille, qui ont besoin d’être écoutées et informées. ¨Par exemple, une femme dont le père a été aidé à partir à l’étranger, sa fille a échangé avant et après et a dit que cela l’avait beaucoup aidée. Créer un certain lien, nous sommes une petite et jeune association, mais avec un bon sens de l’écoute et de l’humain !! Clément rappelle la phrase « donner de la vie au temps, et pas du temps à la vie des personnes … » qui était de Schwartzenberg.
Pour le Choix, SP et AMM ne sont pas des frères ennemis mais complémentaires, « je vais au bout et je choisis les SP mais je peux changer d’avis pour raison de souffrance psychique ou physique et j’ai le droit de changer d’avis ».
Les SP sont d’excellents soins pour éviter la douleur et donner du confort mais ne suffisent pas toujours. Quelqu’un diagnostiqué Parkinson demain, n’entrera pas dans le cadre des SP avant des mois ou des années, et ceux-ci manquent dans nombre de départements, vu la suppression depuis des décennies par nombre de gouvernements et un coup de baguette magique appelée loi sur les SP ne réglera pas tout . Nombre de responsables des SP semblent nier les douleurs réfractaires. Une fois la loi votée, certains médecins évolueront et entendront mieux les malades !
Clément remarque que les infos sont dispersées partout en France, chacun à sa vision…lui a ressenti sur certains sujets trop d’informations opposés, sur d’autres rien de très concret ou organisé, il est très facile de s’y perdre
Comment structurer, à l’avenir un organisme central pour avoir toutes les infos nécessaires ou avoir une écoute pour parler de ses besoins ? malades,familles,soignants…
Les personnes concernées doivent parler avec leur médecin qui devrait avoir des infos, suivre une formation éventuellement comme fait en Belgique pour répondre à toutes les questions et l’aider si… la demande existe et persiste.
Problèmes pour appliquer la SPJCD, c’est une procédure compliquée pour les médecins qui hésitent …à le faire. Une bonne loi est appliquée et celle-ci ne l’est pas ou très peu. Trop de gens craignent de parler de mort à leur médecin. Le dialogue soignant/soigné qui doit s’établir, le médecin ne doit pas craindre de se remettre en question et contacter un confrère avec plus d’expertise… N’oublions pas l’importance du décret d’application, indispensable à toute loi !
Dans le corps médical un grand pourcentage de soignants sont pour une loi sur l’aide à mourir, mais l’insécurité juridique pour les médecins actuellement, les rend prudents.
Création d’un organisme pour centraliser la fin de vie, communiquer, créer du matériel pédagogique…, suicide assisté, soins palliatifs, rester chez eux, est-ce cohérent ?
Sur le principe, c’est une excellente idée mais en pratique, il y a la crainte qu’un organisme privilégie les infos qui freinent déjà tant le corps médical que les citoyens. Un organisme indépendant, apolitique, indépendant de toutes croyance serait une solution plus sage. La pluralité des associations est un atout important pour les citoyens car qui aurait le contrôle d’un groupe centralisé ?? Toutes les associations n’ont pas les mêmes moyens et Le Choix ne touche pas de subsides contrairement à d’autres.
Troisième partie du mémoire : aider les personnes à planifier leur fin de vie, Jonathan Denis, président de l’ADMD, a dit qu’il aimerait que ce soit l’Etat qui aide les gens à planifier. Qui, comment ? Des personnes seraient prêtes à créer des donations ..etc.
La pluralité des associations c’est important comme en Suisse, Clément évoque l’idée d’une coopérative, d’une association ou d’une fondation qui planifie, avec des ressources en commun pour celles et ceux qui le souhaitent. Pour la fin de vie en général. Une sorte de package ! Mais il faut disposer des moyens financiers et humains pour le faire !!
Clément Mazaleyrat, à qui nous souhaitons bonne chance dans ses projets, nous enverra son mémoire.
20.05.2025