Examinée jeudi 8 avril dans l’Hémicycle, la proposition de loi sur l’euthanasie, défendue par Olivier Falorni, n’a pas été adoptée, faute de temps. Les oppositions ont été marquées. La balle est désormais dans le camp de l’exécutif.
Le texte porté par Olivier Falorni, a suscité une adhésion trans partisane. Et une très large majorité : 240 voix pour, 48 contre.HOMA PADILLA//MAXPPP
Pour les opposants à l’euthanasie, c’est un grand soulagement. Le 8 avril, au soir, les députés n’ont pas réussi, faute de temps, à adopter, en séance, la proposition de loi « donnant et garantissant le droit à une fin de vie libre et choisie ». Voilà qui n’est pas une surprise : organisée dans le cadre d’une niche parlementaire du groupe Libertés et territoires, le vote du texte semblait, dès le départ, compromis, par un temps contraint et le dépôt de plus de 3 000 amendements.
→ ANALYSE. Euthanasie : une offensive politique risquée pour LREM
Une large majorité pour l’article premier
Mais, paradoxalement, ce qui est un soulagement pour les uns peut être, « en même temps », une victoire, pour les autres. Car si l’examen du texte n’a pu se terminer, son article premier a été adopté. Or, il s’agit de la mesure emblématique de la loi : elle prévoit qu’« une assistance médicalisée à mourir peut être demandée par toute personne capable et majeure », si elle se trouve dans une phase « avancée ou terminale » d’une affection « grave et incurable », provoquant une souffrance « physique ou psychique » qui « ne peut être apaisée » ou que la personne concernée juge « insupportable ». Pour continuer son parcours parlementaire, cette proposition de loi doit maintenant être réinscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée.
De Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) à Éric Woerth (LR), de Guillaume Chiche (non inscrit) à Olivier Faure (PS), le texte porté par Olivier Falorni, a suscité une adhésion transpartisane. Et une très large majorité : 240 voix pour, 48 contre.
Dans l’hémicycle, les opposants se sont pourtant montrés combatifs, et de tout bord politique eux aussi, en dépit d’une concentration d’amendements signés LR. Marc Le Fur a défendu les soins palliatifs. « Les gens ne veulent pas mourir, ils veulent être accompagnés ». Anne Genetet, sa collègue LREM, a fait part de son malaise, en tant que médecin : « Je ne donnerai jamais la mort volontairement ». Depuis le banc communiste, Pierre Dharréville a alerté sur « la rupture éthique », que représente le geste de tuer, tandis que Patrick Hetzel (LR) pointait les zones grises et les risques de dérives de la proposition de loi. Avec une préoccupation : qu’entendre par « souffrance psychique » ? « Il y a une interprétation très extensive, poursuit le député. Les médecins eux-mêmes se posent la question. Est-ce que cela ne devrait pas nous interroger ? »
Autre crainte soulevée par Xavier Breton (LR), l’impact d’un élargissement progressif de la loi. « Comment être sûr, qu’un jour, les mineurs ne seront pas concernés par cette aide à mourir ? » a-t-il lancé. C’est le cas, en Belgique depuis 2014.
À l’exécutif de prendre la main
Éthique de la vulnérabilité d’un côté. Éthique de l’autonomie de l’autre. Pour défendre leur point de vue, c’est la notion « d’ultime liberté » qu’Olivier Falorni et ses alliés ont mise en avant. Reste que, au-delà de la symbolique de vote de son article premier, faute d’un texte adopté dans son intégralité, c’est à l’exécutif, désormais, d’inscrire le sujet « fin de vie » à l’agenda législatif. Ce qu’il ne semblait, jeudi 8, guère pressé de faire, en pleine période de crise sanitaire.
Source :
« La Croix » – Alice Le Dréau – 09.04.21