Lettre aux député·e·s du 26/05/2025
LOI FIN DE VIE :
CE QUE PERSONNE NE PEUT SAVOIR À L’AVANCE
Madame la Députée, Monsieur le Député,
la maladie peut frapper tout un chacun à tout moment et aucun d’entre nous ne peut savoir à l’avance et avec certitude comment elle ou il réagira face aux souffrances qui s’y rattachent.
Prenons le cas de Paulette Guinchard qui avait pris position contre l’aide à mourir alors qu’elle était secrétaire d’État aux personnes âgées et qui fut diagnostiquée des années plus tard d’une maladie dégénérative rare et incurable. Elle subit alors des souffrances insupportables contre lesquelles le corps médical ne pouvait rien. Et elle, qui, en bonne santé, était contre l’idée d’une aide à mourir, a choisi le suicide assisté en Suisse et a chargé son mari de défendre l’aide à mourir en France.


Il y a également le cas d’Alain Juppé, membre du Conseil constitutionnel, ancien Premier ministre, plusieurs fois ministre et ancien maire de Bordeaux. Il était très réticent à l’idée qu’on puisse choisir la date de sa mort ou de sa fin de vie parce qu’il pensait que « la vie, c’est Dieu – s’il existe – qui la donne et qui la retire ». Mais il a changé d’avis après l’expérience de la fin de vie de son père, atteint d’un cancer qui a traîné pendant plusieurs années.
Dans les derniers jours, Alain Juppé l’a vu « se tordre de douleur sur son lit d’hôpital » et il a pensé : « Dans certaines circonstances, la vie est certes sacrée, mais la dignité de la personne aussi. » Maintenant, il pense que pouvoir choisir sa fin de vie est une liberté. « Ceux qui n’ont pas envie d’exercer ce droit n’ont qu’à ne pas l’utiliser. »
Encore plus récemment Gérald Darmanin a affirmé qu’il avait évolué sur la question, influencé par sa vie d’élu local et sa vie de fils qui a accompagné son père en fin de vie. Aujourd’hui il est favorable au projet de loi tel qu’il a été défendu par Monsieur Olivier Falorni.

Avant de prendre une position ferme sur cette question, il convient de faire l’effort de se projeter dans les souffrances liées à certaines affections, telle la maladie de Charcot, la paralysie complète, et les cancers particulièrement redoutables. Essayons d’imaginer ce que nous ressentirions dans de telles situations sans nous égarer dans des abstractions ou des considérations philosophiques ou idéologiques.
Certes, nous ne réagissons pas tous de la même façon face à la souffrance extrême : certains décident de continuer à lutter et d’autres préfèrent mourir ; et ce que nous remettons en question c’est la certitude de ceux qui disent savoir. Car, comment, aujourd’hui, alors qu’aucune maladie ne nous invalide, pourrions-nous être certains de notre choix ? N’est-il pas envisageable que nous changions d’avis, comme Paulette Guinchard et Alain Juppé l’ont fait ? Ne souhaiterions-nous pas pouvoir choisir de vivre ou de mourir si par malheur nous nous trouvions dans une de ces situations tragiques ?
Si ces cas de changement d’avis et l’appel à l’empathie ne suffisent pas à vous convaincre du bien-fondé de l’aide à mourir et que diverses objections surgissent dans votre esprit, nous vous invitons à lire notre argumentaire :
Nous vous remercions par avance de l’attention que vous voudrez bien porter à nos réflexions, et vous prions de croire, Madame la Députée, Monsieur le Député, en l’assurance de notre respectueuse considération.
Ne l’oubliez pas Mesdames et Messieurs les élu(e)s :
les malades, vos électrices et électeurs, comptent sur vous
Nathalie Andrews & Annie Wallet
Co-présidentes